Les affections buccodentaires représentent un problème très fréquent chez le cochon d’Inde. Non traitées, elles s’accompagnent de complications générales rapidement graves voire mortelles. Les récidives sont également fréquentes, ce qui oblige le vétérinaire à toujours réserver son pronostic. Parmi ces affections buccodentaires, les malocclusions, incisives et molaires, sont les plus fréquentes. Les abcès buccodentaires sont également rencontrés, ainsi que d’autres affections plus spécifiques au cochon d’Inde (stomatite, chéilite, dermite labiale, lésions de nature métabolique, congénitale ou infectieuse). Nous traiterons dans cet article des malocclusions. Serons successivement envisagés l’anatomie bucco-dentaire, les causes des malocclusions, les signes cliniques associés, les traitements et la prévention.
la dentition du cochon d’Inde : anatomie
Elle se compose de 4 dents molaires et 1 incisive par demi-mâchoire, soit un total de 20 dents. Toutes les dents sont à croissance continue. Le cochon d’Inde ne développe pas de dents lactéales, iI nait avec une dentition d’adulte déjà fonctionnelle. L’émail de couleur blanche, la dentine, la pulpe et le cément sont de structure similaire à celle rencontrée chez le lapin.
Les incisives
Les cochons d’Inde possèdent 4 incisives à pousse continue : une paire supérieure (dite maxillaire) et une paire inférieure (dite mandibulaire). Les incisives maxillaires sont très développées, très longues et incurvées selon le trajet de l’alvéole dentaire. Les incisives mandibulaires sont très semblables aux maxillaires, mais plus courtes et moins incurvées. Elles viennent en contact avec la face interne des incisives maxillaires. L’émail ne se trouve que sur la face externe et les bords latéraux des incisives, mais pas sur la face palatine, d’où la taille en biseau des incisives qui permet de sectionner les aliments ligneux (le foin et l’herbe par exemple).La croissance des incisives est de 8 à 10 cm par an, soit de 6 à 8 mm par mois.
Les molaires
Il y a 16 molaires (également appelées dents jugales) chez le cochon d’Inde. Elles sont à croissance continue avec en surface un cadre d’émail, de l’ivoire central et un cément périphérique. Les racines des molaires inférieures occupent la branche horizontale de la mandibule, alors que les racines des molaires supérieures sont situées dans l’os maxillaire.On compte une prémolaire et 3 molaires vraies sur chaque demi-mâchoire. Ces dents ont une face occlusale en forme de S. Les molaires supérieures sont orientées vers le bas et l’extérieur, alors que les molaires inférieures sont orientées vers le haut et vers l’intérieur de la cavité buccale. Les molaires sont en occlusion (c’est-à-dire qu’elles se touchent) au repos. Le plan d’occlusion est oblique, incliné à 30 % par rapport à l’horizontale, du dehors vers le dedans.
Comment fonctionne la mastication ?
Les rapports occlusifs
L’occlusion dentaire et la position des mâchoires au repos diffèrent de celles du lapin. Les molaires sont en contact au repos. Les incisives inférieures sont en retrait par rapport aux incisives supérieures et le contact ne se fait que par le bord des incisives inférieures qui est en contact au repos avec la face interne des incisives supérieures. La surface occlusale des dents jugales est lisse et inclinée de 30 ° par rapport à l’horizontale (du dehors vers le dedans , ce qui n’est pas le cas chez le chinchilla par exemple). Les molaires mandibulaires ont deux racines et elles s’insèrent de façon très oblique sur les arcades mandibulaires. Les molaires maxillaires ont plusieurs racines et elles partent du milieu du palais. Les couronnes sont entièrement recouvertes d’émail.
Les mouvements masticatoires
Les possibilités d’ouverture buccale sont très limitées, car les condyles mandibulaires cylindriques glissent dans des gouttières temporales dirigées d’avant en arrière. Les incisives étant un peu en contact en position de repos, le cochon d’Inde doit rétracter la mandibule lors de la mastication, afin d’éviter une interférence du mouvement masticatoire par contact incisif. Les mouvements masticatoires sont essentiellement antéro-postérieurs (d’avant en arrière), avec très peu de latéralité contrairement à ce qui est observé chez le lapinLes articulations temporo-mandibulaires sont très mobiles et elles présentent une grande laxité, ceci pour deux raisons :
l’articulation temporo-mandibulaire est constituée d’une simple gouttière temporale non fermée dans laquelle glisse librement le condyle mandibulaireles muscles masticateurs très puissants (faisceau superficiel des masséters) sont insérés directement sur l’extrémité caudale de la mandibule, ce qui permet une rétraction très puissante.Le système masticatoire est donc fragile, précaire. En équilibre instable, il peut être perturbé par des causes nutritionnelles ou pathologiques. L’inclinaison des molaires, la forte incurvation des incisives et les mouvements masticatoires d’avant en arrière entraînent des problèmes différents que ceux rencontrés chez le lapin.
Quelle est l’origine des malocclusions ?
Les différents types de malocclusions : molaires ou incisives
Il existe chez le cochon d’Inde des malocclusions incisives vraies assez rares, et des malocclusions molaires très fréquentes. L’origine de la malocclusion dentaire est aujourd’hui bien connue chez le lapin (causes avant tout alimentaires, et à un degré moindre génétiques) et le chinchilla (causes avant tout génétiques) Elle n’est par contre pas clairement établie chez le cochon d’Inde, elle est sans doute polyfactorielle, et reste sujette à hypothèses et discussions. Le problème doit donc être abordé de façon différente à celle du lapin et il faut se garder d’être péremptoire dans ses affirmations.
Les facteurs favorisants les malocclusions dentaires
Les facteurs suivants ont été ou sont invoqués :
carence en vitamine C. Les signes cliniques d’hypovitaminose C incluent des douleurs et une fragilité dentaire, ce qui peut occasionner un défaut de mastication et une malocclusion.déséquilibre minéral. Il peut intervenir dans la qualité structurale des dents, prédisposition génétique. Elle est indiscutable, la plupart des malocclusions congénitales interviennent entre deux et trois ans.usure insuffisante des dents. Tout comme chez le lapin, l’alimentation à base de granulés exclusive n’assure pas une mastication physiologique car les granulés, tels des rondins, ne permettent pas un contact entre les molaires, ils ne permettent pas de ce fait une bonne usure des dents dont la pousse est continue. Les extrudés à surface rugueuse sont moins dangereux que les granulés proprement dits à surface lisse. Les aliments riches en silice (foin, herbe) ont un effet abrasif indispensable, en plus de leur apport en cellulose.abreuvement à l’aide d’un biberon. Ce mode d’abreuvement n’est pas non plus physiologique, il n’existe pas dans la nature. Lors de la prise de boisson, le cochon d’Inde aspire le liquide. Cette aspiration nécessite un mouvement inspiratoire associé à une contraction labiale et jugale, elle ne fait pas intervenir la denture. Le biberon implique que la tête soit relevée vers le haut, il suppose aussi un mouvement de succion qui fait travailler les muscles masticateurs et l’arcade mandibulaire. Des études dynamiques et statistiques complémentaires sont nécessaires, mais des observations concordantes vont dans le sens d’une plus grande fréquence des malocclusions avec l’abreuvement par biberon qui est donc à proscrireComment se développe la malocclusion ?
Nous n’abordons pas ici les malocclusions incisives vraies. Pour mémoire dents jugales = molaires, nous employons l’un ou l’autre terme. Hyperélongation = pousse excessive
La façon dont se forme la malocclusion (ce qu’on appelle la pathogénie) est complexe et encore non clairement définie. Il est d’ailleurs préférable de parler de syndrome malocclusion plutôt que de malocclusion tout court. On peut rencontrer aussi bien des brachygnathismes (reculs) mandibulaires que des prognathismes mandibulaires (plus fréquents). Les maloccclusions des dents jugales peuvent faire intervenir trois grands types de modifications bucco-dentaires :
angulation inhabituelle du plan d’occlusion (angulation normale 30 °)croissance excessive de la couronne des molaires et formation d’un pont au-dessus de la langue du fait de l’angulation des molairesrétrocroissance d’une ou plusieurs dents jugales Malocclusion molaire avec pont partiel de la première prémolaire inférieure gauche Malocclusion molaire avec pont partiel de la première prémolaire inférieure droite Ces modifications peuvent être isolées, coexister ou se succéder. La malocclusion peut être simplement caractérisée par une angulation inhabituelle (excessive) du plan d’occlusion. Discrète, difficile à détecter, elle peut surtout être diagnostiquée par un scanner. Si elle ne cause pas de retentissement important au niveau postérieur, le mouvement masticatoire et la position modifiée de la mandibule entraînent cependant l’apparition d’une malocclusion incisive secondaire Dans le cas d’une malocclusion molaire, on observe une croissance excessive de la couronne dentaire. De par l’angulation des dents du cochon d’Inde (30 degrés par rapport à l’horizontale), les dents mandibulaires peuvent facilement converger et former un pont partiel puis complet au-dessus de la langue. Ce pont s’accompagne dans les cas plus avancés d’un véritable chevauchement au-dessus de la langue, ce qui emprisonne celle-ci et entrave ses mouvements. La mastication et la déglutition deviennent impossibles. Le pronostic est beaucoup plus réservé, car les conséquences sont rapidement très lourdes. Les conséquences d’une malocclusion peuvent être catastrophiques.
Une malocclusion entraîne une gêne et une diminution de l’activité masticatoire.
Le muscle masticateur masséter très développé chez le cochon d’Inde, va s’atrophier, provoquant un recul de la mandibule et accentuer la malocclusion. La situation devient irrémédiable : même si la cause première est traitée, il sera impossible de redonner au muscle masséter sa puissance initiale et ainsi de replacer correctement la mandibule. Le pronostic est alors désespéré. Les malocclusions molaires peuvent s’accompagner d’une élongation coronaire. Cette élongation dentaire concerne en général en bloc toutes les dents d’une ou deux hémi-mâchoires. Elle est responsable d’un déplacement secondaire de la mandibule, ce qui entraîne ou aggrave des lésions déjà existantes (luxation temporo-mandibulaire ou inflammation des muscles masséters). Deux cas de figure peuvent se présenter :
l’élongation concerne une seule hémi-mandibule : dans ce cas la mandibule est déviée latéralement, ce qui se traduit par une usure en biseau des incisives. Le pronostic reste relativement bon. l’élongation concerne les deux hémi-mandibules : les dents jugales forment un pont partiel puis complet. - les dents jugales supérieures n’ayant plus les dents jugales inférieures opposables continuent de pousser latéralement vers les parois jugales, jusqu’à créer des poches parodontales ou des plaies au niveau des muqueuses jugales par leurs pointes latérales acérées.
- du fait de cette élongation des dents jugales, la cavité buccale reste ouverte en permanence avec incapacité de sa fermeture, ce qui entraîne de la salivation et empêche les mouvements normaux de préhension et de mastication des aliments
- cette élongation entraîne une luxation progressive de la mandibule vers l’avant, ce qui engendre un défaut d’occlusion et une élongation des incisives.
- lorsque le déplacement antérieur de la mandibule est à son maximum, les dernières dents jugales supérieures n’ont plus de dents opposables au niveau des dents jugales inférieures. Elles ne s’usent plus et continuent de pousser, se placent en arrière de la dernière dent jugale inférieure, jusqu’à empêcher tout retour en arrière de la mandibule donc toute possibilité de mastication.
- l’hyperélongation également rétrograde peut entraîner une perforation des os mandibulaires. Il en résulte un inconfort et une douleur à la mastication en raison de la pression sur le nerf intra-alvéolaire. Une correction de l’occlusion ne résout pas cet inconfort qui doit être pris en compte dans le traitement et le pronostic de la maladie et des risques d’infection donc d’abcès buccodentaire. L’hyperélongation des dents mandibulaires est cependant moins fréquente que chez le lapin, ce qui peut s’expliquer par une plus grande courbure radiculaire chez le cochon d’Inde. Il en résulte une moins grande fréquence d’abcès buccodentaires mandibulaires que chez le lapin.
Mais cette hyperélongation peut également concerner les dents jugales maxillaires et entraîner une perforation de l’os maxillaire vers les cavités orbitaires ou nasales, avec un risque d’abcès maxillaires, plus fréquent que les abcès mandibulaires, ou d’abcès sous-orbitaires. Quels signes doivent inquiéter?
Ce sont avant tout les informations concernant les possibilités de s’alimenter, ce qui suppose une bonne observation de la part du propriétaire. Selon le niveau de la malocclusion :
le cochon d’Inde ne mange plus normalement il a un appétit capricieux et sélectif il ne mange plus du toutil semble avoir faim mais il est dans l’impossibilité de s’alimenteril salive Les signes de douleur buccodentaire Comment diagnostiquer une malocclusion ?Cette démarche concerne le vétérinaireLes examens complémentaires
Ils peuvent être utiles voire indispensables pour préciser le diagnostic et le pronostic Radiographies
Une simple contention physique est souvent insuffisante, les cochons d’Inde étant rarement coopératifs lorsqu’ils sont couchés sur la table de radiographie. Une anesthésie gazeuse est donc préférable pour l’obtention de bons clichés. Malocclusion molaire avec recule mandibulaire et déviation des prémières préolaires inférieures vesr l'avant. Tomodensitographie (scanner)
La difficulté de l’examen jugal sur les radiographies conventionnelles donne un intérêt de premier ordre à la tomodensitographie. Elle permet de latéraliser et de préciser les sites lésionnels en évitant la superposition des deux hémi-mâchoires. Elle permet aussi d’obtenir des images 3D et des coupes transversales au niveau des dents postérieures, permettant ainsi une bien meilleure visualisation. Son intérêt est certain pour établir un bon diagnostic et par la-même un bon pronostic, que ce soit pour des soins ou avant une intervention chirurgicale Quels signes cliniques ?
Malocclusion incisive
Il convient de faire la distinction entre les malocclusions incisives vraies, le plus souvent de bon pronostic et qui n’entravent pas la prise de nourriture, et les malocclusions incisives secondaires à une malocclusion molaire Malocclusion incisives vraies
Rappelons que les incisives ne sont pas en contact au repos et que les incisives mandibulaires sont en retrait par rapport aux incisives maxillaires. Les malocclusions incisives vraies sont moins fréquentes chez le cochon d’Inde que chez le lapin pour plusieurs raisons :les malocclusions incisives congénitales sont rares la croissance excessive des incisives mandibulaires ne se fait pas en avant des incisives maxillaires dans les conditions physiologiques, mais en arrière, ce qui oblige la mandibule à reculer et à se positionner en arrière, donnant ainsi un profil de rétrognathie. l’ostéodystrophie n’est pas une maladie rapportée chez le cochon d’Inde Les incisives n’adoptent pas de position incurvée comme chez le lapin, et de ce fait causent rarement des blessures aux tissus environnants. Les incisives mandibulaires du cochon d’Inde sont naturellement très longues. Il est important de ne pas confondre ceci avec une croissance excessive due à une malocclusion et se garder de couper hâtivement dans un tel cas les incisives sur un cochon d’Inde par ailleurs anorexique. On déclenche alors une anorexie qui peut être définitive. Malocclusion incisive primaire d'origine traumatique avec déplacement des inférieures vers la gauche et espace interdentaire anormal Malocclusion incisive primaire avec incurvation de l'incisive inférieure gauche vers l'intérieur et dégénerescence de l'incisive inférieure droite Malocclusion incisive secondaire à une maloccclusion molaire préexistente avec latéralité Malocclusion molaire
La malocclusion des dents jugales est l’affection dentaire la plus fréquemment observée chez le cochon d’Inde. Les signes sont souvent plus sévères que chez le lapin avec apparition d’une anorexie partielle ou complète, et de graves complications digestives et métaboliques Le signe le plus précoce est une dysorexie associée à une malocclusion des incisives. La salivation et les mâchouillements ne sont pas fréquents, contrairement à ce qui est observé chez le lapin. On observe une difficulté de préhension ou de mastication des aliments, avec un appétit conservé mais sélectif. Puis le cochon d’Inde relâche ses aliments, sa région mentonnière est souillée par la salive. La pousse des molaires et notamment des premières molaires entraîne une ouverture forcée de la cavité buccale, avec impossibilité de fermeture, et un allongement des incisives mandibulaires. Les incisives sont souvent usées en biseau, ce qui traduit une atteinte dysymétrique avec une gêne masticatrice d’une seule mandibule. Par la suite le cochon d’Inde reste bouche ouverte, se met à saliver et une luxation latérale de la mâchoire peut intervenir. Lorsque la pousse des molaires inférieures est bilatérale, un prognathisme mandibulaire se développe progressivement. Le cochon d’Inde maigrit ensuite progressivement et son état général se détériore. Des complications métaboliques et digestives apparaissent. Scanner de la tête vue latérale , image 3D. Recul mandibulaire ( flèche 2) et début de perforation de la mandibule droite par une racine molaire ( flèche 1) Scanner de la tête vue ventrale , image 3D. Déviation des incisives inférieures ( flèche 2) et début de perforation de la mandibule droite par une racine molaire ( flèche 1) Scanner de la tête coupe transversale au niveau molaire. Pointes dentaires des prémolaires supérieures (flèches) dirigées vers l'extérieur et inclinaison anormale des prémolaires inférieures des prémolaires dirigées vers la langue. Quels traitements ?
Mesures préopératoires
Une anesthésie gazeuse est mise en place (isoflurane ou sévoflurane) Il est indispensable d’effectuer avant toute intervention un nettoyage soigneux de la cavité buccale souvent encombrée de débris alimentaires avec des compresses et des mêches de coton montées sur pince.Parage des incisives
Ce parage se justifie sur des incisives biseautées ou qui se chevauchent, il peut compléter un parage des dents jugalesTrois points importants sont à signaler :il est préférable d’effectuer le parage sous anesthésie flash car la coupe est douloureuse, le travail est plus facile sur un patient correctement immobilisé et il n’est pas utile d’infliger des souffrances que l’on peut éviterne pas couper les incisives à la pince, ce qui exposerait à une coupe de mauvaise qualité et à une fracture dentaire souvent très biseautéela coupe des incisives inférieures doit toujours être limitée. Ces dernières partiellement masquées par les lèvres sont trois fois plus longues que les incisives supérieures et leur extrémité se situe en arrière des incisivessupérieures, presqu’en contact avec le palais lorsque la mandibule est fermée. Une coupe trop courte à toutes les chances d’empêcher une reprise de l’alimentation spontanée, par incapacité d’assurer la préhension des alimentsLes incisives sont coupées avec un disque abrasif monté sur le minimoteur. La coupe est d’abord transversale, puis le biseau est recréé de façon à ce que la pointe du biseau des incisives inférieures vienne se placer en arrière du biseau des incisives supérieures. Malocclusion incisive primaire : les incisives supérieures n'affrontent plus les inférieures, elles s'incurvent vers l'intérieur Même cas après parage dentaire des incisives avec un disque monté sur minimoteur Parage des dents jugales
Les spicules dentaires sont coupées à l’aide d’un matériel dentaire adapté aux lapins et rongeurs dit de Crossley. Les dents trop longues sont raccourcies à l’aide des ciseaux à bout rond ou d’un minimoteur de dentisterie. Il faut veiller à bien respecter la symétrie droite/gauche et l’inclinaison naturelle de la surface occlusale de 30 °. Toutes les précautions doivent être prises pour ne pas blesser la langue et les parois jugales. Un rinçage de la cavité buccale est réalisé avec une compresse imbibée de sérum physiologique..Soins postopératoires
Ces soins sont importants, ils conditionnent l’efficacité de l’intervention. L’intervention étant lourde sur un cochon d’Inde généralement affaibli et anorexique, il est préférable de réaliser une hospitalisation de 24 à 48 heures pour administrer des antalgiques, assurer une alimentation parentérale par gavage, vérifier la reprise du transit digestif et contrôler les complications métaboliques par des analyses d’urines. Ces soins comprennent :antalgiques le jour de l’intervention, et les jours suivants, anti-inflammatoires gavages forcés 3 à 4 fois par jourrégulateurs du transit digestif, métronidazole (antibiotique le plus efficace pour prévenir les abcès)) Le traitement anti-inflammatoire devra être continué pendant une longue période de plusieurs semaines. Il pourra être complété par la gabapentine qui est indiquée dans les neuropathies périphériques. Ce traitement permet d’éviter les douleurs dentaires, nerveuses (compression du nerf alvéolaire), articulaires, ligamentaires et musculaires et donc de favoriser une mastication rapide et prolongée qui constitue la meilleure prévention des récidives. Les patients présentant des signes de lipidose doivent bénéficier d’un traitement hépatoprotecteur pour prévenir ou combattre l’acidocétose, complété par une phytothérapie en EPS (Chardon Marie, Desmodium, Orthosiphon, Pissenlit, Piloselle,..) Quelle évolution ?
Le pronostic est toujours très réservé en raison de la complexité des causes, de la gravité des lésions dentaires, osseuses et musculaires, de l’incapacité mécanique de s’alimenter et de la gravité des conséquences métaboliques. Un processus de malocclusion installé ne guérit pas, il est sujet à récidive si le cochon d’Inde ne retrouve pas immédiatement une mastication normale. Le muscle masséter va s’atrophier et même si la cause première est traitée, il sera impossible de lui redonner sa puissance initiale, et le pronostic devient rapidement très défavorable. Les interventions de parage dentaires sont techniquement agressives. Une antibiothérapie de couverture est conseillée (métronidazole) car elles peuvent se compliquer d’abcès dentaires postopératoires Les états de lipidose compliqués d’acidocétose sont d’un mauvais pronostic, ils conditionnent la survie de l’animal et se traduisent par la présence de corps cétoniques urinaires. Une analyse d’urine par bandelette urinaire à chaque contrôle doit donc être systématique. Une présence de corps cétoniques avec un appétit conservé est d’un pronostic plutôt favorable, elle indique une atteinte hépatique sérieuse mais réversible. Si les corps cétoniques sont présents avec un refus de nourriture, le pronostic est défavorable et l’atteinte hépatique irréversible. Le cochon d’Inde en état de malocclusion a donc une espérance de vie limitée quelles que soient les thérapeutiques mises en œuvre et le propriétaire doit en être informé. Il est donc indispensable de procéder au diagnostic de ce syndrome malocclusion le plus précocement possible.