MON COBAYE A LA TETE PENCHEE. ATTENTION A L'OTITE !
par le Dr Didier BOUSSARIE
Mise à jour le
L’otite du cobaye peut se définir comme une affection de l’oreille. Il s’agit dans la grande majorité des cas d’une atteinte de l’oreille moyenne et cette affection peut être unilatérale ou bilatérale.
Les otites moyennes sont fréquentes chez le jeune cobaye. Elles présentent toujours un caractère de gravité et un pronostic réservé.
Quand suspecter une otite chez le cochon d'Inde?
L’attention du propriétaire doit être alertée par le fait que son cobaye se tient la tête penchée
Les têtes penchées sont très fréquemment observées chez le cobaye, surtout chez les jeunes et le plus souvent elles sont associées à des infections de la sphère ORL et à des carences en vitamine C.
L’otite peut aller de la simple tête penchée jusqu’à la station debout impossible avec des tournis sur lui-même et un nystagmus (mouvements pendulaires des yeux de façon symétrique dans un plan horizontal ou vertical). Le cobaye peut tomber sur le côté et présenter des mouvements de pédalage désespérés voir des crises épileptiformes. Dans certains cas, il présente plutôt des tremblements, des vertiges, des troubles d’équilibre surtout lorsqu’il change brutalement de position
Des signes d’atteinte de la sphère ORL accompagnent généralement les signes d’otite, surtout à la phase de début. Ils se traduisent par une conjonctivite, un jetage nasal, des éternuements et/ou de la toux, une sensiblité de la trachée et du pharynx.
A quoi est due l'otite?
L’otite correspond dans la majorité des cas à une otite dite moyenne responsable d’un état clinique appelé syndrome vestibulaire. Cette otite dite moyenne correspond à une atteinte osseuse de l’oreille moyenne représentée notamment par la bulle tympanique.
Les signes cliniques peuvent correspondre à une atteinte préférentielle unilatérale (d’un seul côté) ou bilatérale (atteinte des deux bulles tympaniques). Dans ce dernier cas, le cobaye présente plutôt des tremblements, des vertiges, des troubles d’équilibre surtout lorsqu’il change brutalement de position
L’infection de départ se situe dans la cavité buccale et la région pharyngée et elle remonte par la trompe d’Eustache jusque dans l’oreille moyenne.
Des polypes peuvent secondairement se développer dans la bulle tympanique. Dans tous les cas des lésions ostéoprolifératives (polypes) et ostéolytiques (destruction osseuse) se développent dans la cavité tympanique.
L’origine et l’évolution sont donc différentes de ce qui est observé chez le lapin, pour lequel les otites moyennes sont souvent liées à un coryza infectieux ou secondaires à une otite externe (qu’elle soit bactérienne, ou parasitaire)
Comment diagnostiquer une otite ?
Par les signes cliniques
Ils sont évocateurs : tête penchée sur un jeune cobaye, associée ou non à des signes ORL en début d’affection, incapacité de se tenir debout et mouvements de tournis dans les cas graves
Attitude typique d'un cobaye présentant une otite moyenne
Par l’imagerie
Otite bilatérale
avant tout des radiographies crâniennes de face : on observe de façon très évocatrice une opacification de la ou des bulles tympaniques en cas d’otite moyenne. Cette opacification correspond à une ostéite de la bulle tympanique, et non pas à la présence de pus dans la bulle tympanique
Radiographie du crâne. Otite bilatérale avec opacification des bulles tympaniques
éventuellement une endoscopie du conduit auditif externe : mais elle permet de diagnostiquer une otite externe hyperplasique ou des céruminomes (tumeurs des glandes cérumineuses du conduit auditif externe) et non pas une otite moyenne. De plus l’otite externe hyperplasique s’observe essentiellement chez le chien ou le chat. Quant aux céruminomes ils sont rares chez le cobaye et s’observent surtout chez le hamster.
éventuellement un scanner crânien mais le coût de cet examen ne se justifie pas en première intention. Des cliches radiographiques de bonne qualité donneront autant de renseignements.
Les autres examens , notamment une bactériologie à partir d’un prélèvement au niveau du conduit auditif externe ne présentent pas d’intérêt
tumeurs du conduit auditif externe ou de l’oreille moyenne
mycose systémique
Les autres causes de torticolis chez le cobaye sont très rares
n’y a pas de gale d’oreille (Otodectes cynotis) chez le cobaye. Celle-ci se rencontre chez le lapin, mais pas chez les rongeurs.
Traitement
Un traitement médical
Il doit dans tous les cas être privilégié en première intention.
Il doit associer
une antibiothérapie soutenue et adaptée, active contre les infections ORL du cobaye, prescrite pendant une période suffisamment longue et à posologie suffisante
des anti-inflammatoires en début de traitement
des correcteurs d’équilibre. On ne dispose pas en médecine vétérinaire de telles molécules mais elles sont disponibles en médecine humaine
de la vitamine C
Le vétérinaire est seul juge de la prescription dont il assume la responsabilité
Une intervention chirurgicale
Trépanation de la bulle tympanique
Elle consiste en une trépanation de la bulle tympanique.
Elle suppose :
un diagnostic de certitude qui peut être assuré par :
des radiographies crâniennes de face : opacification de la ou des bulles tympaniques en cas d’otite moyenne. La chirurgie alors envisageable est une trépanation de la bulle tympanique. Je l’ai déjà réalisée à plusieurs reprises dans de rares cas graves où le traitement médical était inefficace. La chirurgie est lourde, le coût important et les risques chirurgicaux élevés. La chirurgie ne résout pas le problème neurologique, autrement dit le cobaye conserve la tête penchée
une endoscopie du conduit auditif externe (CAE) pour une otite externe hyperplasique. Ceci s’observe essentiellement chez le chien ou le chat. Des céruminomes peuvent s’observer chez le cobaye et le hamster, ils ne justifient pas dans de nombreux cas une ablation du CAE, mais une simple exérèse des lésions tumorales
éventuellement un scanner crânien mais le coût de cet examen ne se justifie pas pour une jeune association
un échec du traitement médical approprié qui associe antibiotiques adaptés, anti-inflammatoires adaptés , vitamine C à dose thérapeutique et correcteurs de l’équilibre appropriés
cette intervention Est-elle risquée ?
La chirurgie est lourde, le coût très important et les risques chirurgicaux élevés (risques de mort pendant ou après intervention).
L’intervention n’est généralement pas suivie d’une disparition des signes cliniques, autrement dit le cobaye conserve sa tête penchée, il ne retrouve pas un port de tête normal.
Est-elle indispensable ?
Non, les lésions que l’on trouve dans les bulles tympaniques sont généralement des polypes, des débris osseux (secondaires à la destruction osseuse) ou des sécrétions, mais pas une masse de pus
La chirurgie n’a donc rien d’indispensable dans la très grande majorité des cas. Un cobaye peut très bien vivre tout à fait normalement même si sa tête reste partiellement penchée
Le cobaye peut également présenter d’autres troubles neurologiques
D’origine infectieuse
Chorioméningite lymphocytaire
Cette affection est surtout décrite chez le hamster, la souris, la gerbille et le chinchilla. Elle est due à un virus appelé Arenavirus et reste rare voire très rare chez le cobaye.
elle se traduit par une paralysie des membres postérieurs et une méningite
le virus peut être contracté par
inhalation, ingestion ou contact direct avec la salive, les urines ou les crottes
les insectes piqueurs
la voie transplacentaire
cette maladie est une zoonose. Elle provoque chez l’homme des maux de tête, des vomissements, de la fièvre. L’évolution est bénigne dans la grande majorité des cas, mais la maladie peut être dangereuse chez la femme enceinte.
Rage
Elle est rarissime chez le cobaye car les risques de transmission sont exceptionnellement réunis mais le cobaye y est sensible
D’origine non infectieuse
Crises d’épilepsie consécutives au prurit
Un cobaye peut présenter des crises d’épilepsie suite à une crise de prurit intense d’origine parasitaire (gale sarcoptique à Sarcoptes scabiei, gale du cobaye à Trixacarus caviae). Ces crises qui durent généralement 1 à 2 minutes voire moins guérissent spontanément.
Les antiépileptiques sont inutiles, il est impératif de soigner la cause parasitaire.
Le coin des curieux et curieuses
LE SYNDROME VESTIBULAIRE
Le syndrome vestibulaire correspond à une altération de la fonction du système vestibulaire qui assure la stabilité spatiale de la tête et du corps.
Ce système vestibulaire est composé :
d’une partie périphérique avec
des récepteurs sensoriels du labyrinthe vestibulaire
le nerf vestibulaire qui est une des deux branches du nerf VIII (nerf auditif ou vestibulo-cochléaire). Il traverse l’os pétreux et relie le cerveau au labyrinthe osseux vestibulaire (portion de l’oreille interne creusée dans les os du crâne). Il reçoit les informations concernant le maintien de l’équilibre.
d’une partie centrale avec
le noyau vestibulaire du tronc cérébral
les fibres situés dans le cervelet
Le syndrome vestibulaire correspond à l’altération de certaines structures vestibulaires :
un torticolis correspond à une atteinte ipsilatérale du système vestibulaire central (le noyau vestibulaire, le lobe floculo-nodulaire du cervelet) ou périphérique (le nerf VIII). La lésion peut donc se situer à 3 niveaux.
un nystagmus traduit une atteinte du système vestibulaire périphérique, plus précisément des récepteurs sensoriels du labyrinthe osseux vestibulaire
Un état de torpeur, des réflexes proprioceptifs altérés, un nystagmus vertical traduisent une atteinte du système vestibulaire central.
La paralysie faciale correspond à une atteinte du nerf VII au niveau de l’oreille moyenne. Elle peut se produire avant, pendant ou après l’apparition des signes vestibulaires.